IRONMAN Finlande 2021

Par oĂč commencer đŸ€” 19 Juillet 2020, je m’inscris pour l’IRONMAN de Finlande en AoĂ»t 2021, avec l’objectif officiel de passer au niveau du dessus (et Ă©galement de finir un IRONMAN complet, puisque celui de Nice en 2019 auquel j’avais participĂ© avait Ă©tĂ© raccourci en raison de la canicule), et l’objectif officieux de me qualifier pour les championnats du monde IRONMAN Ă  HawaĂŻ. Pour obtenir cette prĂ©cieuse qualification, il faut le plus souvent terminer sur le podium de sa catĂ©gorie d’ñge (30-34 ans pour moi), donc bien mieux que ma 27Ăšme place Ă  l’IRONMAN de Nice!

L’objectif que j’avais en tĂȘte n’est pas tombĂ© du ciel, j’ai regardĂ© ce dont j’étais capable en 2020, ce que j’estimais ĂȘtre capable de faire avec une bonne prĂ©paration, les statistiques de temps et performances des athlĂštes de mon Ăąge s’étant qualifiĂ©s les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes et j’en passe. Bref, je me suis dit “ça peut le faire”.

Et finalement
 ça l’a fait !

Autant arrĂȘter le suspens tout de suite, ON PART À HAWAÏ! J’ai terminĂ© 2Ăšme de ma catĂ©gorie et 13Ăšme au classement gĂ©nĂ©ral, bien au-delĂ  de mes espĂ©rances! J’avais 5 minis objectifs en arrivant Ă  la course:

  • Faire moins d’1h pour les 3.8km de Natation - RatĂ© ❌
  • Faire moins de 5h sur les 180km de VĂ©lo - RatĂ© ❌
  • Faire moins de 3h sur le marathon - RatĂ© ❌
  • Me qualifier pour HawaĂŻ - RĂ©ussi ✅
  • Faire une belle course et ĂȘtre fier de moi - RĂ©ussi ✅

2/5 la note est moyenne, mais j’ai rempli les deux objectifs les plus importants. Et j’étais Ă  deux doigts de rĂ©ussir les autres. Quelques statistiques pour les amoureux de la data:

  • Temps total 9h16’21”
  • 2Ăšme des 30-34 ans
  • 9Ăšme homme au scratch
  • 13Ăšme au gĂ©nĂ©ral (oui les pros femmes sont bien plus fortes que moi đŸ˜ČđŸ˜Č, elles sont vraiments TRÈS impressionnantes)
  • Natation 3.8km - 1h02’02”
    • 1’38”/100m
    • 34 mouvements/min de moyenne
    • 47Ăšme temps au gĂ©nĂ©ral
  • Transition T1 - 2’54”
  • VĂ©lo 180km 1200m D+ - 5h04’10”
    • 35.51 km/h
    • 200 Watts de moyenne
    • 211 Watts en puissance normalisĂ©e
    • 220 TSS
    • 59Ăšme au gĂ©nĂ©ral (j’ai encore pris une fessĂ©e
)
  • Transition T2 - 2’14”
  • Course Ă  pied 42km 400m D+ - 3h05’04”
    • 4’24”/km
    • 309 Watts de moyenne
    • 159 RSS
    • 3Ăšme au gĂ©nĂ©ral (lĂ  c’est bien)

Il reste du travail en natation et en vĂ©lo, Ă  pied on est bien. Voyons comment s’est dĂ©roulĂ©e la course.

Préparation et arrivée en Finlande

C’est en fait cette partie qui a Ă©tĂ© la plus cruciale pour terminer l’IRONMAN. Une annĂ©e d’entraĂźnements, de planification et de jalons Ă  passer, avec des confinements au milieu. Je voulais vraiment passer au niveau supĂ©rieur Ă  vĂ©lo et en natation pour arrĂȘter de prendre le tarif par les autres concurrents, mon niveau Ă  pied Ă©tant amplement suffisant pour jouer le podium.

J’avais terminĂ© la natation en 1h01’ Ă  Nice, passer sous l’heure Ă©tait raisonnable. Mais tout ceci Ă©tait sans compter notre ami le covid et la fermeture des piscines en
 Octobre. MĂȘme pas le temps de commencer Ă  re-nager sĂ©rieusement. Mais j’étais dĂ©terminĂ© Ă  faire une bonne prĂ©paration, et encore plus dĂ©terminĂ© Ă  arriver Ă  la course avec zĂ©ro regret et zĂ©ro excuse, c’est trop facile de dire “sans le covid j’aurai pu faire mieux”.

Alors j’ai rĂ©cupĂ©rĂ© la piscine gonflable chez mes parents et je l’ai installĂ©e dans le jardin. 1 mĂštre 15 de profondeur, 5 mĂštres de diamĂštre, parfait. Plus qu’à accrocher une corde Ă  un poteau Ă  l’extĂ©rieur de la piscine, relier la corde Ă  une vieille chambre Ă  air (pour faire un genre d’élastique), puis Ă  une ceinture autour de ma taille, et me voilĂ  en train de nager le crawl statiquement dans la piscine. C’est monotone, les sensations sont Ă©tranges, mais au moins je nage. Avec la combinaison Ă©videmment. Mes voisins me regardent en souriant en passant devant la maison, je me demande ce qu’ils se disent 😅

Petit rappel sur le climat de la Normandie Ă  partir d’Octobre, on est pas sur de la canicule. L’eau est petit Ă  petit descendue en tempĂ©rature, de 13 degrĂ©s au dĂ©but Ă  moins de 5 Ă  partir de DĂ©cembre. Entre 10 et 13 degrĂ©s ça va, entre 5 et 10 j’ai dĂ» mettre des gants, des chaussons et une sous couche thermique pour rĂ©ussir Ă  nager plus de 10 minutes. Sous les 5 degrĂ©s c’était vraiment trĂšs dur de tenir 15 minutes.

L’eau absorbe la chaleur corporelle Ă  une vitesse hallucinante, et une fois que le corps se refroidit, les extrĂ©mitĂ©s sont privĂ©es de sang parce que le corps privilĂ©gie les organes (entre les poumons et un doigt le choix est vite fait). Et ça commence Ă  faire mal. Je ne suis pas du genre douillet, mais ça fait vraiment trĂšs mal. Le pire Ă©tant sous la douche ensuite quand le sang revient dans les mains et les pieds. Je n’ai pas honte de dire que j’ai criĂ© de douleur plusieurs fois 😅😅 Et j’ai aussi vĂ©cu la sensation du corps qui nous prĂ©vient qu’on est en danger de mort, du genre “faut quelque chose tout de suite parce que je peux plus tenir là”, vraiment trĂšs dĂ©routant (et flippant!).

Mais bon, c’est le jeu ma pauvre Lucette, 3 bains dans la piscine par semaine, mĂȘme si j’étais Ă  peu prĂšs sĂ»r de ne pas progresser, je n’allais pas non plus rĂ©gresser. J’aurai stabilisĂ© le niveau jusqu’à la rĂ©ouverture des piscines!

AprĂšs de longs mois, les piscines ont enfin ouvert leurs portes, et il a fallu quelques mois pour retrouver un niveau correct. Et comme j’étais dĂ©terminĂ© Ă  ne rien laisser au hasard, je me suis dit que ce serait intĂ©ressant d’intĂ©grer des sĂ©ances de nage en eau vive (pas Ă  la piscine donc), et de prĂ©fĂ©rence dans un lac plutĂŽt qu’en mer, puisque la course sera dans un lac. Sauf que les lacs ça ne court pas les rues en Normandie. A moins que
 J’avais remarquĂ© sur Google Maps que le chĂąteau Ă  quelques kilomĂštres de chez moi (le ChĂąteau du Bec) possĂšde deux grands Ă©tangs de plus de 200 mĂštres de long. Sauf que ce sont des lacs privĂ©s. Qui ne tente rien n’a rien, j’appelle Nathalie, la propriĂ©taire du chĂąteau (dans lequel ont lieu beaucoup de mariages) et lui explique ma situation et mon souhait de pouvoir nager dans le lac. Elle a Ă©tĂ© super enthousiaste et prĂȘte Ă  m’aider dans mon projet sportif! Me voilĂ  donc, une Ă  deux fois par semaine, Ă  traverser la cour du chĂąteau avec ma combinaison de natation pour aller nager dans l’étang. Super sensations dans l’eau, j’ai pĂ» m’habituer Ă  nager avec la combinaison, Ă  m’orienter, Ă  ne pas paniquer quand un poisson s’enfuit ou quand un bout de bois te touche 😅 Et pour un fan du moyen Ăąge comme moi
 c’était un ultime kiffe d’aller au chĂąteau pour m’entraĂźner!

Concernant le vĂ©lo, j’avais dĂ©jĂ  bien progressĂ© depuis 2019, il fallait maintenant conserver ce niveau (voire l’élever) et surtout travailler avec le nouveau vĂ©lo de triathlon sur la position aĂ©rodynamique, parce que rester dans cette position pendant plusieurs heures est vraiment un travail de long terme. En plus de cela, il est plus difficile de maintenir la mĂȘme puissance une fois en position, donc deuxiĂšme axe de travail. A part 4 sĂ©ances, tous les entraĂźnements ont Ă©tĂ© faits sur le home trainer, donc dans le garage devant un Ă©cran. Certaines sĂ©ances sont trĂšs intenses et durent 1h, d’autres plus longues, jusqu’à 5h. Vive les samedi matins sur le vĂ©lo Ă  regarder des films, podcasts, lire des livres, bref Ă  tuer le temps 😅

L’avantage du home trainer, c’est qu’il n’y a pas de pause, les jambes doivents toujours appuyer sur les pĂ©dales, donc il est certain que si vous passer la sĂ©ance de 5h sur le home trainer, elle passera facilement dehors ensuite. Le deuxiĂšme avantage est qu’on est Ă  l’intĂ©rieur, donc au revoir le temps pourri de la Normandie en hiver, et surtout au revoir aux automobilistes qui sont parfois dangereux. ZĂ©ro risque = zĂ©ro accident.

Bref, les entraĂźnements se sont bien passĂ©s, et ont atteint environ 15h par semaine en fin de prĂ©paration. C’est pas mal, mais toujours Ă  des annĂ©es lumiĂšres des pros (avec leur 30h+). Mais j’ai une famille et un contrat de travail Ă  honorer en mĂȘme temps!

Ce que je retiens surtout de cet investissement (si jamais quelqu’un lit ce passage et souhaite se lancer dans une aventure similaire), c’est qu’il faut communiquer avec votre moitiĂ©. Soyez d’accord sur le volume d’entraĂźnement et les adaptations qu’il faut faire dans la vie de tous les jours. Toutes mes sĂ©ances Ă©taient planifiĂ©es et ajoutĂ©es dans le calendrier commun que nous avons avec Audrey. Je lui partage mes ressentis, mes doutes, et nous veillons Ă  ce que cela n’impacte pas (au un minimum) notre vie de couple et de famille. Parce que notre fille se moque que son pĂšre fasse du vĂ©lo, elle prĂ©fĂšre que je lui courre aprĂšs 😁😁

Nous arrivons enfin en Finlande, double dose de vaccin fait, voyage prĂ©parĂ© au cordeau. Audrey et Livia sont avec moi, nous arrivons au logement dans la soirĂ©e du Mardi, la course est le Samedi. Nous sommes au pied d’un lac, dans la forĂȘt, on retrouve bien le paysage des pays scandinaves! Nous avons trois jours devant nous pour faire le check-in, faire une reconnaissance vĂ©lo, nager dans le lac, dĂ©poser les affaires de course le Vendredi. Et surtout en profiter pour nous reposer, ça faisait un moment que nous n’avions pas pris de vacances!

La pression monte doucement (non non elle monte Ă  mort!), et Audrey me donne un soir une pochette carton. Je dĂ©couvre Ă  l’intĂ©rieur une montagne de lettres, de dessins, de photos et de petites attentions de mes proches pour m’encourager. J’ai mĂȘme eu le droit Ă  une chanson de mes sƓurs! J’y reviendrai plus tard mais j’ai Ă©tĂ© trĂšs (trĂšs trĂšs, mais alors trĂšs trĂšs trĂšs) touchĂ©, Audrey a bien fait de me donner tout ça un peu avant la course, j’ai dĂ» beaucoup me rĂ©hydrater pour me remettre de mes Ă©motions 😆

Bref nous voilĂ  dĂ©jĂ  la veille de la course, les jambes sont affutĂ©es et prĂȘtes au combat, le ventre est bien rempli, on se couche tĂŽt, le dĂ©part de la course est Ă  7h45. Je suis Ă©trangement serein malgrĂ© l’objectif que je me suis fixĂ©. Le fait d’avoir la certitude d’avoir tout mis en Ɠuvre pour rĂ©ussir y est probablement pour beaucoup. MĂȘme en cas d’échec, j’aurai donnĂ© le maximum, zĂ©ro excuse. Lever 5h30, Audrey a mal dormi contrairement Ă  moi, c’est la premiĂšre fois que je me rĂ©veille aussi frais et dispo un jour de course 😂 (j’ai rĂ©ussi Ă  dormir 8h!). Petit dĂ©jeuner fait, mĂȘme pas besoin de rĂ©veiller notre fille qui s’est rĂ©veillĂ©e toute seule et a commencĂ© Ă  chanter dans son lit Ă  6h15.

Direction le parc Ă  vĂ©lo Ă  5 minutes en voiture, l’organisation Ă©tait vraiment facile sur cet IRONMAN. Je pose mes ravitaillements, je refais un check up mental de chaque transition dans ma tĂȘte, je vĂ©rifie le vĂ©lo, OK! On arrive au dĂ©part de la course Ă  500 mĂštres du parc, le soleil se lĂšve sur le lac, le ciel est bleu, la tempĂ©rature est parfaite Ă  17 degrĂ©s, conditions optimales (pour les athlĂštes ET les supporters!).

J’enfile ma combinaison de natation, je fais un dernier bisou Ă  Livia et Ă  Audrey, ce sont des moments trĂšs chargĂ©s en Ă©motions. Tant d’efforts et de sueur pour arriver ici, tant de monde derriĂšre moi pour me soutenir, tant d’espĂ©rance et d’organisation pour laisser un minimum de place au hasard. Je dis en rigolant Ă  Audrey “j’ai toutes les chialades dans ma gorge prĂȘtes Ă  sortir” (et elles sont toujours lĂ  mĂȘme en Ă©crivant ces mots). Je vais me mettre au dĂ©part, je me mets presque tout devant, il est temps d’assumer le niveau maintenant. Je souhaite bonne chance aux personnes autour de moi, mĂȘme si ce sont mes adversaires on s’engage tous dans une aventure hors du commun! Je conseille Ă  un des gars Ă  cĂŽtĂ© de moi de mettre sa puce de chronomĂ©trage Ă  la cheville gauche (et pas la droite, sinon elle peut se prendre dans le dĂ©railleur pendant le vĂ©lo, pro tips!). Ce gars est allemand, il me dit que c’est son premier IRONMAN, je lui rĂ©ponds que ça va le faire, qu’il faut qu’il s’amuse, en anglais bien sĂ»r. “This is going to be awesome dude!” (je lui ai vraiment dit ça). En position
 BIP! et c’est parti pour une grande journĂ©e!

Natation

Top dĂ©part, je plonge (un grand mot, on dira plutĂŽt je m’allonge dans l’eau) dans le lac. L’eau est vraiment bonne (20 degrĂ©s), avec la combinaison et comparĂ© Ă  la piscine dans le jardin, c’est un vrai bonheur. L’eau a presque un goĂ»t sucrĂ©, c’est bien plus plaisant que l’eau de mer. J’hurle dans l’eau pour exprimer mes Ă©motions, je suis tellement heureux de participer Ă  la course et laisser l’énergie sortir.

Ça paraĂźtra probablement bizarre Ă  beaucoup de gens, mais on est tellement chargĂ© d’adrĂ©naline et d’émotions au dĂ©part qu’il faut que ça sorte d’une maniĂšre ou d’une autre. Je fais tourner les bras, tout va bien. Et puis on attend que ça se passe 😂 3.8km c’est assez long en nageant, on a le temps de voir les bouĂ©es se rapprocher tout doucement
 On entend rien avec l’eau dans les oreilles, on voit par intermittence quand la tĂȘte sort de l’eau, on a du mal Ă  reconnaĂźtre les autres concurrents.

Mais je profite du moment quand mĂȘme, le paysage est magnifique, il y a peu de gens autour de moi, donc c’est facile de poser sa nage et de nager dĂ©tendu. L’eau a une couleur rougeĂątre et assez trouble, l’orientation est tout de mĂȘme aisĂ©e. Demi tour au bout d’environ 1,2 km, et direction la sortie de l’eau. Je bats plus fort des jambes Ă  la fin pour envoyer du sang dans les jambes et je me relĂšve sur le sable, un peu tĂŽt en y repensant, j’ai dĂ» marcher avec de l’eau Ă  mi cuisse pendant 20 mĂštres


Je check ma montre, 1h02’, en retard de 2 minutes mais je n’ai pas eu l’impression de me fatiguer, en fait je n’ai rien senti du tout, c’est plutĂŽt cool de ne pas taper dans les rĂ©serves en sachant qu’il reste 8h de course 😂. Je bondis dans le parc Ă  vĂ©lo, j’attrape le casque, le dossard, j’enfile des chaussettes et je dĂ©boule Ă  la sortie, moins de 3 minutes, c’est cool. Les chaussures de vĂ©lo sont dĂ©jĂ  clipsĂ©es sur les pĂ©dales pour gagner du temps, je glisse donc mes pieds dedans et lance mon vĂ©lo (que j’ai nommĂ© “Fend la bise”) sur les routes finlandaies. See you in 180km!

VĂ©lo

Le vĂ©lo c’est cool, ça va vite, on voit plein de paysages diffĂ©rents, mais au bout d’un moment ça fait toujours mal aux fesses.

J’avais en tĂȘte de boucler cette partie en moins de 5h, et aprĂšs le repĂ©rage fait quelques jours avant je me disais que c’était dans mes cordes. Le parcours n’est pas du tout technique (comparĂ© aux descentes de Nice!), la route est droite et en trĂšs bon Ă©tat. Par contre elle n’est jamais plate, toujours des faux plats ou des petites collines Ă  grimper. Le vrai challenge Ă©tait lĂ , rĂ©ussir Ă  maintenir une bonne vitesse moyenne avec des changements d’allures incessants. En plus de la route ondulante (j’ai pas de meilleur adjectif), la forĂȘt et les lacs qui bordent la route crĂ©ent des masses d’air assez Ă©tranges, on se retrouve donc parfois en descente Ă , Ă  peine 30 km/h sans sentir de vent puis 500 mĂštres plus loin on passe les 45 km/h dans un faux plat montant en prenant plein de vent dans le nez, sans avoir Ă  beaucoup appuyer sur les pĂ©dales đŸ€·â€â™‚ïžđŸ€·â€â™‚ïžđŸ€·â€â™‚ïž

Pas grave, le tout c’est de regarder les watts (la puissance produite par les jambes qui appuient sur les pĂ©dales) sur la montre et de s’y fier. Le plan Ă©tait d’arriver Ă  tenir environ 220 Watts de moyenne sur tout le vĂ©lo, chose que j’avais dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ© sur le home trainer Ă  plusieurs reprises, donc pas d’inconnues normalement!

Deux boucles d’environ 85 km Ă  rĂ©aliser plus le tronçon pour rejoindre le parc Ă  vĂ©lo. La mĂ©tĂ©o Ă©tait trĂšs bonne, pas mal de vent sur certaines portions mais les conditions Ă©taient vraiment au rendez-vous. MalgrĂ© mes progrĂšs sur le vĂ©lo, j’ai encore pris une fessĂ©e. Il me reste encore du travail avant d’arriver au niveau des meilleurs! Il en faut plus nĂ©anmoins pour me dĂ©stabiliser, un IRONMAN c’est avant une course contre soi-mĂȘme, et s’écarter du plan de dĂ©part c’est le plus souvent aller Ă  la catastrophe. Ce n’est pas le jour de la course que l’on va subitement ĂȘtre beaucoup plus fort ou pouvoir tenir une vitesse plus Ă©levĂ©e.

Donc je reste dans ma course, je suis mon plan de nutrition/hydratation, avec mes barres de dattes maison et mes gels de miel. On pense souvent aux entraĂźnements quand on parle de sport, mais pour les sports d’endurance, la nutrition est trĂšs souvent la clĂ© entre une bonne et une mauvaise course. On comprend trĂšs bien qu’il faut mettre du carburant dans les voitures de F1, c’est identique avec le corps humain. Et plus la nourriture est de bonne qualitĂ©, meilleur est le rendement. C’est pour ça qu’on ne met pas du SP95 dans les voitures de course! Donc on mange la mĂȘme chose qu’à l’entraĂźnement, le systĂšme digestif est habituĂ© Ă  cette nourriture et devient hyper efficace pour la digĂ©rer, donc il faut lui faciliter la vie!

Contrairement Ă  mes aventures passĂ©es, il ne s’est rien passĂ© sur le vĂ©lo (et c’est tant mieux), pas de souci mĂ©canique, pas de frayeur, pas d’anecdote croustillante. J’ai juste pris une Ă©norme averse sur la tĂȘte pendant les 20 derniĂšres minutes. Oui parce que le temps s’est un peu gĂątĂ© Ă  partir de lĂ !

J’arrive finalement au parc Ă  vĂ©lo aprĂšs 5h04’, c’est plus que prĂ©vu mais ma cuisse gauche commençait Ă  ĂȘtre trĂšs trĂšs proche de la crampe Ă  chaque fois que j’appuyais un peu fort, donc la deuxiĂšme partie de course Ă©tait un peu moins rapide. Parce qu’aprĂšs le vĂ©lo il y a tout de mĂȘme 42 km Ă  faire en courant, il faut en garder un peu sous le pied! Bref je n’ai qu’une chose en tĂȘte, c’est montrer Ă  mes concurrents que maintenant on rentre sur mon territoire, j’ai bien retenu les dossards de ceux qui m’ont dĂ©passĂ© Ă  vĂ©lo, j’ai bien l’intention de les Ă©coeurer quand je les dĂ©passerai Ă  pied 😂

Course Ă  pied

Je bondis une fois de plus de mon vĂ©lo et cours jusqu’à mes affaires de course Ă  pied, je vide (trĂšs soigneusement 😅) mes chaussures dans lesquelles j’ai mis mon ravitaillement pour Ă©viter de laisser trainer quelques chose, et je m’élance tel un cerf sur le marathon. J’ai mal aux jambes mais ce sont mes sensations normales aprĂšs les longues sĂ©ances de vĂ©lo, et ça ne m’empĂȘche pas du tout de courir Ă  un bon rythme. Je boucle le premier kilomĂštre en 4’06” (presque 15 km/h), je suis vraiment Ă  l’aise, je n’ai mĂȘme pas l’impression de courir.

J’ai en tĂȘte moins de 3h, donc il faudra rester Ă  4’16”/km ou moins. Le parcours est assez technique, il y a beaucoup de petites bosses et de chemins caillouteux, pas si facile 😅 De la mĂȘme maniĂšre que sur le vĂ©lo, impossible de maintenir une allure constante, il faut relancer rĂ©guliĂšrement et le nombre de portions plates est vraiment trĂšs faible. Mais les jambes sont bonnes!

La course se dĂ©roule en 4 tours de 10 km. L’avantage d’arriver dans les premiers c’est qu’on est tranquille pendant les premiers tours, et que l’on peut profiter des encouragements de tous les supporters, et surtout des deux meilleurs supportrices du monde, ma femme et ma fille. Avant mĂȘme de les voir j’entends le mĂ©gaphone d’Audrey au loin pendant mon premier tour, je redresse la tĂȘte fiĂšrement, je vois Livia qui danse sur le bord et qui commence Ă  me faire coucou, c’est dur de ne pas s’effondrer en larmes ! Le sourire jusqu’aux oreilles, je continue ma course le cƓur gonflĂ© d’émotions.

Je suis plutĂŽt du genre lucide dans ces Ă©vĂšnements, je ne suis pas le genre d’athlĂšte Ă  m’enfermer dans mon effort et Ă  fixer la route devant moi, je remercie les bĂ©nĂ©voles aux ravitaillements (mĂȘme si c’est avec un sourire seulement parfois), j’encourage ceux qui m’encouragent Ă  faire encore plus de bruits. Je me suis mĂȘme dĂ©couvert des talents d’ambianceur 😂 Les quatres boucles passaient devant l’arrivĂ©e, oĂč la majoritĂ© des supporters Ă©taient postĂ©s, Ă  mon deuxiĂšme tour, les gens Ă©taient dĂ©jĂ  chauds, je me suis surpris Ă  crier “Come on Finland, MAKE SOME NOISE!” en passant, j’ai eu droit Ă  une standing ovation 😂😂😂 en y repensant j’aurais pĂ» faire un flop monstrueux.

Bref, aprĂšs 25km l’allure est toujours bonne et j’ai dĂ©jĂ  rattrapĂ©, puis dĂ©passĂ© ceux que j’avais dans le viseur pendant le vĂ©lo. Je vous avais dit que le match n’était pas terminĂ©! Le parcours commence Ă  se remplir pendant mon 3Ăšme tour, beaucoup de concurrents en ont terminĂ© avec le vĂ©lo. Je continue Ă  doubler tout le monde, je n’ai trouvĂ© personne courant Ă  mon allure. L’une des athlĂštes a dit en me voyant la doubler “Damn he’s on fire”, affirmatif 😂

Un mois avant la course, j’avais fait part Ă  Audrey de mon apprĂ©hension du marathon, en lui disant que j’avais peut ĂȘtre Ă©tĂ© un peu lĂ©ger sur le volume de kilomĂštres Ă  pied. Je faisais au maximum 45 km/semaine, ce qui est peu, mais je n’avais pas trop besoin de travailler mon niveau Ă  pied, surtout en comparaison de la nage et du vĂ©lo. Craintes qui se sont confirmĂ©es, il m’a vraiment manquĂ© du jus sur les 10 derniers kilomĂštres! AprĂšs 30 km, mes cuisses Ă©taient devenues deux troncs d’arbre, pas le mieux pour courir. J’ai commencĂ© Ă  sĂ©rieusement souffrir! Pour couronner le tout la pluie s’est mise Ă  tomber, pas la pluie fine de Normandie, mais des trombes d’eau, trempĂ© jusqu’aux os en 1 minute!

J’ai utilisĂ© un des Ă©lĂ©ments sur lequel j’ai beaucoup progressĂ© ces derniers temps. Moi qui Ă©tait plutĂŽt dans le type sang froid et calculateur, j’ai mis 30 ans avant de me rendre compte de la puissance des Ă©motions. Au mĂȘme titre qu’on apprend Ă  connaĂźtre comment rĂ©agit son corps Ă  l’effort, on peut Ă©galement Ă©couter ce qu’il nous dit. La douleur, la souffrance, l’euphorie, la dĂ©termination, la motivation, les hauts et les bas sont toutes les phases par lesquelles on passe pendant une Ă©preuve aussi longue. Se nourrir de ses Ă©motions peut ĂȘtre une force supplĂ©mentaire incroyable. Pendant ma prĂ©paration, je ne compte plus le nombre de fois oĂč j’ai fini en pleurs Ă  la fin des sĂ©ances intenses de vĂ©lo ou de course Ă  pied, tellement l’effort Ă©tait violent ou douloureux. Mais la pratique nous aide Ă  nous transcender et atteindre un niveau Ă©motif oĂč l’on se surpasse, ou du moins oĂč la douleur physique n’est plus une limitation. C’est dĂ©routant les premiĂšres fois, et je me suis senti ridicule, mais on rĂ©ussit Ă  passer des sĂ©ances que l’on pensait hors de notre portĂ©e. Sans parler du bien ĂȘtre que l’on ressent ensuite!

C’est donc ça que j’ai utilisĂ©, j’ai serrĂ© les dents, je me suis nourri des encouragements des supporters, de la dĂ©charge d’amour et d’adrĂ©naline Ă  chaque fois que je passais devant ma petite famille. Et mĂȘme si l’allure avait un peu diminuĂ©e, que tout mon corps me susurrait de m’arrĂȘter, j’ai tenu bon et j’ai pensĂ© Ă  toutes les personnes qui me soutenaient, Ă  ma famille, mes amis qui avaient tous les yeux sur le tracker IRONMAN pour suivre la course! Impossible de flancher maintenant. 35, 36, 37, les kilomĂštres continuent de dĂ©filer, 38, 39, 40, je passe le dernier poste de ravitaillement, 41
 plus qu’un kilomĂštre, un seul pour profiter du moment, d’ĂȘtre en Finlande avec ma femme et ma fille, d’avoir rĂ©ussi une course sans encombre, d’ĂȘtre arrivĂ© au bout de l’épreuve et au bout de mes forces, d’avoir le sentiment que peu importe le rĂ©sultat j’ai donnĂ© tout ce que j’avais, de graver dans ma mĂ©moire cette douleur physique qui me rappellera que la dĂ©termination peut nous emmener trĂšs loin.

Je ne voyais mĂȘme pas encore la ligne d’arrivĂ©e que je pleurais dĂ©jĂ  (je parle bien de la chialade en rĂšgle avec les sanglots et tout). Je grimpe la derniĂšre cĂŽte en bombe, je vois (et j’entends) Audrey Ă  cĂŽtĂ© du tapis rouge de l’arrivĂ©e, je ne maitrise plus rien, et Ă  vrai dire ce moment est flou dans ma tĂȘte, je me revois juste faire les derniers pas puis sauter dans les airs en passant la ligne d’arrivĂ©e, en m’entendant crier ma joie et ma satisfaction, puis me frapper les joues pour me congratuler (il est bizarre ce monsieur).

Audrey a fait forte impression, le speaker de l’IRONMAN a repris la chanson du mĂ©gaphone pour mon arrivĂ©e, enfin c’est Audrey qui me racontera ça par la suite, parce que j’étais vraiment sur une autre planĂšte. 9h16’21” d’efforts, c’était pas si long en fait.

Audrey me prend dans ses bras, me tend Livia qui sourit encore plus que moi, je suis Ă©puisĂ© mais je suis heureux. Un des concurrents arrivĂ© juste avant moi et dans le mĂȘme Ă©tat Ă©motif, il est français et on dĂ©couvrira juste ensuite qu’en plus d’ĂȘtre un gars super sympa, nous allons partager les deux premiĂšres places du podium dans notre catĂ©gorie.

MalgrĂ© la baisse de rĂ©gime sur la fin de parcours, je finis avec le troisiĂšme temps en course Ă  pied en 3h05’, j’avais dit que c’était mon point fort 😂 J’ai mal partout, mon corps me dit qu’il faut se reposer maintenant!

Bref, ça fait maintenant 3 jours que la course est passĂ©e, les courbatures ont disparu mais je suis toujours sur un nuage, je suis vraiment satisfait de la performance, et encore plus d’avoir la prĂ©cieuse qualification pour HawaĂŻ en poche. J’avais dit qu’il fallait que je sois dans le top 5 pour ĂȘtre sĂ»r de l’avoir, en Ă©tant 2Ăšme, c’était 100% garanti!

J’avais envie de parler de tellement d’autres sujets pendant ce rapport, mais ce sera pour une autre fois, celui-ci est dĂ©jĂ  bien rempli.

Comment terminer ce rapport de course autrement qu’en remerciant une infinitĂ© de fois toutes les personnes qui Ă©taient avec moi (mĂȘme Ă  distance) pendant cette journĂ©e, ma famille et tous mes proches. J’ai failli me lancer dans la liste des noms, mais il y a tellement de personnes que ça doublerait la taille du rapport! Tout ce que je peux dire c’est que je vous aime, et que je suis profondĂ©ment heureux d’avoir des gens aussi gĂ©niaux dans ma vie. Je l’ai dit plein de fois Ă  Audrey, cela m’a fait bizarre et j’étais presque gĂȘnĂ© d’avoir eu autant de messages et de petites attentions juste pour moi. Je le rĂ©pĂšte, j’ai Ă©tĂ© vraiment trĂšs (trĂšs trĂšs trĂšs) touchĂ©.

Un grand merci Ă©galement Ă  mon club le LHSA, Ă  ma commune Mannevillette et Ă  mon employeur Doctolib qui me soutiennent dans ces aventures, et ce n’est pas terminĂ©! Un Ă©norme merci Ă  Nathalie du ChĂąteau du Bec pour sa gentillesse, son accueil et l’accĂšs au lac! Et toujours et encore merci Ă  Rosalie de LibreForme8, l’ange gardien de ma nutrition 😊

Et rendez-vous Ă  HawaĂŻ! Aloha!

Olivier Gerbron
Engineering Manager

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